jeudi 7 mars 2024

8 mars, Journée internationale des droits des femmes : comment la réflexion féministe a nourri le cinéma.

 


      L'association de cinéma "Lumière(s) du Sud" de Six-Fours projetait le 18 septembre 2023 en séance spéciale le film de Delphine SEYRIG, "Sois belle et tais-toi!" (1976), réalisé en vidéo dont la souplesse d'utilisation correspondait à la démarche politique d'urgence des années 1970.

Revoir ce film permet de comprendre le rôle qu’a joué la réflexion féministe dans l’évolution à long terme des pratiques à l’égard des actrices dans le milieu du cinéma.

 

 

 

              Soirée débat autour du film « Sois belle et tais-toi » au Six n’étoiles de Six-Fours,

              le 18 septembre 2023.

 

Un film choral dont la démarche est aussi politique

Pendant deux heures, Delphine SEYRIG questionnait face caméra vingt-trois actrices françaises (Marie Dubois, Maria Schneider, Juliet Berto, Anne Wiazemski...) et américaines (Jane Fonda, Jill Clayburgh, Ellen Burstyn, Louise Fletcher, Shirley Mac Laine...) sur leur parcours d'actrices, les rôles qui leur étaient proposés et leurs rapports avec les acteurs, réalisateurs, producteurs et le milieu du cinéma.


La démarche était politique et féministe mais sans aucune agressivité.
Les questions posées aux actrices, Delphine SEYRIG, féministe de la première heure, se les posait à elle-même.

Les propos recueillis par ces femmes actrices en une sorte de "choeur" sont sans appel : le milieu du cinéma est un cinéma d'hommes fait par et pour des hommes et devant répondre aux fantasmes des hommes. Les rôles destinés et attribués aux femmes étaient insignifiants, déconnectés de la réalité des besoins des femmes et de leur humanité.

Les pistes pour sortir de ce milieu patriarcal du cinéma se dessinent au fil des échanges.

 

Changer le regard du cinéma sur les femmes, un combat à long terme

Marie Dubois rapporte que François Truffaut lui avait dit que pour que ce système change « les femmes devraient écrire leurs propres rôles, leurs propres histoires, imposer leurs propres visions ».
Elles devraient également s'emparer des métiers techniques et devenir elles-mêmes réalisatrices de cinéma pour modifier le regard posé sur les femmes.

Et justement, au mitan des années soixante-dix, un cinéma de réalisatrices naît avec Chantal ACKERMAN ("Jeanne Dielmann" 1975), Marguerite DURAS ("India Song" 1975) et... Delphine SEYRIG ("Sois belle et tais-toi!" 1976), trois films dans lesquels l'engagement de la comédienne est total et dont le dernier long métrage voit son passage à la réalisation.

"Sois belle et tais-toi!" constitue donc bel et bien un moment de bascule de l'Histoire du cinéma.

A l'origine, "Sois belle et tais-toi!" n'est pas programmé pour sortir en salle. Il est diffusé dans le cadre associatif militant féministe et dans un format vidéo VHS, très fragile, à partir de 1981.
Restauré puissamment et récemment en 2018 (voir le lien des Inrocks :
https://lnkd.in/eQnSvnFS), il sort enfin en salle dans le contexte de libération de la parole de Me-too.



     Grand merci à l'association "Lumière(s) du Sud" d'avoir programmé cette diffusion et à Toby Gilbert, collaboratrice de Delphine SEYRIG sur le film en 1976, d'être venue hier soir à Six-Fours nous parler longuement et patiemment de la réalisation du film et du projet politique qu'il sous-tend.

 

Avec « Sois belle et tais-toi », Delphine SEYRIG confirme que si le cinéma n’a pas le pouvoir de changer le monde, il a la capacité de changer le regard sur ses pratiques, ses violences et ses inégalités, et de les modifier patiemment et détermination avec force et conscience.

 

Jean-François VILANOVA, membre de l’association « Lumière(s) du Sud ».

 

#feminisme #cinema #histoireducinema
#delphineseyrig
#8marsdroitsdesfemmes

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire