réalisateur et scénariste nous présente une sélection de ses courts-métrages dont:
La Valise Rouge
Réalisé par Cyrus Neshvad, Nominé aux Oscars 2023 dans la catégorie Meilleur Court-métrage étranger.
La valise rouge incarne le combat des Iraniennes pour leur
liberté. Tourné il y a deux ans, dans des conditions minimalistes à
l'aéroport de Luxembourg, il raconte le destin d'une adolescente de 16
ans qui débarque en Europe pour y être mariée de force à un
quinquagénaire.
Guillaume LEVIL
Guillaume
Levil a écrit ou réalisé des films documentaires ou de fiction qui ont
voyagé partout en France et à l’étranger. Parmi les documentaires, Le Problème du pantalon
a été largement diffusé à la télévision et suivi par les médias. Parmi
les courts-métrages de fiction, Guillaume Levil a réalisé Arthur Rambo et coécrit La Valise rouge – ce dernier film ayant été nommé aux Oscars 2023.
Adepte de
Capra et de Pagnol, il a grandi entre la Provence et la Réunion, et aime
tourner là où il est possible d’attraper une lumière d’inspiration, sur
des terres d’histoires et de légendes.
Après avoir quitté son Ardèche natale à 18 ans, Laure Pradal a fait
des études scientifiques et d’enseignement math-physique, à Lyon, Nîmes,
Montpellier. Suite à un déclic, une rencontre à la fac de lettres avec
un réalisateur, elle décide de s’orienter vers le cinéma. Non pas de
fiction mais de documentaire. Et la voilà qui va très vite réaliser des
courts-métrages pour l’émission de « Strip Tease », émission venue de
Belgique mais qui s’installe sur Canal Plus. Ce sera le coup de foudre et de ce jour,elle n’arrêtera pas de réaliser des documentaires pour France 2, France 3 et Arte. Grâce
à sa rencontre au festival Méditerranéen de Montpellier avec Pascale
Parodi, présidente de l’association six-fournaise « Lumières du Sud » et
de Noémie Dumas, directrice du Six N’Etoiles, la voici venu nous
présenter son dernier doc : « Des livres et des baguettes ». Un
documentaire où un jeune animateur, Nourdine Bara, a eu la superbe idée
de réunir, dans une boulangerie d’un quartier populaire de Montpellier,
la Paillade, des rencontres autour du livre « Dites-le avec un livre ».
Un lieu de rencontres mensuel où se retrouvent, adultes et enfants venus
de tous horizons, de toutes ethnies, qui se réunissent pour parler de
leurs livres préférés ou leurs propres écrits, d’en lire des passages,
de faire de la musique, de chanter, de parler d’eux dans une joyeuse
convivialité, avec des témoignages émouvants ou drôles, en toute liberté
d’expression. Un lieu chargé d’universalité, de bonnes ondes et de
fraternité. Et on ne pouvait s’empêcher de se dire que si la même chose se produisait partout ailleurs, le monde serait meilleur.
Laure Pradal a toujours choisi des sujets qui parlent à tout le monde, qui parlent d’humanité. « Mes
sujets sont variés puisque, pour « Strip-Tease » je réalisais des films
sur l’enfance, puis je suis passée à d’autres sujets comme le portrait
d’une enfant handicapée que j’ai suivie durant quinze ans ou celui de
Jean Carrère, je choisis un thème et je tourne autour de lui avec comme
principe, comme pour « Strip-Tease », de ne faire aucune interview ou
d’ajouter une voix off. Je laisse parler les gens et me contente de les
filmer comme pour ce documentaire « Des livres et des baguettes » où
chacun s’est exprimé en toute liberté, seulement canalisé par Nourdine.
Après, chacun s’exprime comme cette petite fille qui nous lit un extrait
de son livre préféré, cet homme qui nous fait un rap qu’il a écrit,
cette jeune femme qui chante l’opéra magnifiquement, ces musiciens qui
font danser les gens, cette femme qui nous raconte comment elle est
venue à la lecture alors que ses parents sont illettrés… Comment choisissez-vous vos sujets ? Très
souvent par hasard, au gré d’une rencontre, d’un fait divers, comme le
film que je prépare pour juin sur un immeuble vertical où vivaient des
marocains et qui va être détruit. Je suis aussi en train de préparer
un film sur la chanteuse d’opéra que vous voyez dans le film. Elle se
nomme Narimène, elle a un talent fou et n’a pas été prise à un concours
alors qu’elle était l’une des meilleures, tout simplement parce qu’elle
n’a pas voulu enlever son turban qui fait partie intégrante de sa
personnalité ! En ce moment elle est à Londres où sa vie va peut-être
changer. J’ai un collaborateur qui est allé la filmer. Ce ne sont donc pas des films de commande ? Non,
je choisis mon sujet, je me renseigne, je fais des repérages et puis le
monte mes films et je tourne avec une équipe réduite de deux ou trois.
J’écris d’abord un scénario que je propose à divers producteurs et
quelquefois je tourne sans savoir si le scénario ou le film sera
accepté.
Ce peut être frustrant ? Oui, lorsque le
sujet est refusé. Ça ne m’est pas arrivé souvent mais alors je le mets
de côté en me disant que j’y reviendrai plus tard. J’ai toujours deux ou
trois sujets dans ma tête et souvent, entre l’écriture, l’acceptation
et le tournage ça prend du temps. J’arrive à réaliser un film dans
l’année. Quelquefois deux, mais c ‘est rare. C’est un travail de longue
haleine… et de patience ! L’intérêt est que je travaille en toute
liberté, que j’ai tout mon temps, que je n’ai pas de dead line. Avez-vous réalisé des films de fiction ? Non,
et ça ne me préoccupe pas, d’abord parce qu’un film de fiction dépend
de trop de choses : l’argent, les comédiens, les producteurs, le sujet
qui, une fois écrit, doit être suivi. Je ne l’ai fait qu’une fois avec
un film sur un prisonnier. Difficile de tourner en prison, d’y faire
entrer des enfants, dnc je l’ai tourné comme une fiction… sans les
contraintes d’une fiction ! Et ce que j’aime c’est le côté inattendu
car certaines fois, au cours du tournage, il se passe quelque chose
qu’on n’attendait pas. Êtes-vous journaliste ?Avez-vous eu envie d’écrire autour de vos sujets ? Non,
je suis simplement réalisatrice et j’écris la colonne vertébrale de mon
sujet. Je n’interview personne et mes reportages sont des moments de
vie. Vous savez, il suffit de regarder autour de soi pour trouver un
sujet. Après ça, peut-être qu’un jour viendra où je pourrai écrire les
expériences que j’ai vécu autour de ces tournages. Avez-vous eu des refus de gens qui ne voulaient pas que vous les filmiez ? Ça
m’est arrivé mais pas si souvent que ça. Pour certains c’est un non
définitif et je n’insiste pas. Pour d’autres, ils ont envie de
s’exprimer et je les laisse s’exprimer en toute liberté. D’ailleurs, on
est le plus discret possible et très vite ils oublient qu’ils sont
filmés. Ils sont même ravis de se voir sur écran après car le leur
montre toujours le film une fois monté. Je suppose qu’étant donné le format de 50’, vous devez mettre des séquences de côté ?
C’est ce qui m’est arrivé pour « Des livres et des baguettes » car
j’ai dû écourter certaines interventions et j’ai même dû carrément
enlever certaines personnages pourtant intéressants, et je le regrette.
C’est pour cela que j’ai envie de remonter le film et d’en faire un long
métrage car j’ai dû sacrifier de beaux moments. Rencontrer le public est indispensable pour vous ? Oui
car si certains téléspectateurs m’écrivent, beaucoup se contentent de
regarder et d’écouter. Les rencontrer et discuter avec eux est quelque
chose d’indispensable. Sans compter que voir le film sur grand écran, ça
donne une autre dimension au sujet ». Ce soir-là le public a beaucoup
apprécié cette projection et cette rencontre qui a duré longtemps avec
la réalisatrice qui parle de ses films avec une passion qu’elle nous a
fait partager.
Jacques Brachet
jeudi 13 avril 2023
LUNDI 17 AVRIL 2023
20h00 au Six N'étoiles
DES LIVRES ET DES BAGUETTES
de Laure Pradal
A l’intérieur du snack « Le pain d’or »,entre
les croissants et les canettes de coca, on cause deux fois par mois de
Monte Cristo, Oscar Wilde, Tolstoï….
Ils habitent le quartier de la
Mosson situé dans la banlieue nord de Montpellier ou le centre-ville,
ils s’appellent Hassan, Latzeg, Sonia, Hakim,Julien…
Le temps d’une soirée, chacun a dix minutes pour parler de leurs
romans, pièces ou poésies préférés pour l’importance qu’ils ont eu dans
leur parcours, leur vie.
A travers leur exposé, ils s’exposent, se racontentavec sincérité. Le livre : vecteur d’échanges, de mixité, de partage, de lien social.
Laure Pradal
Née en Ardèche en 1962,
Laure Pradal commence une carrière scientifique puis se reconvertit dans
la réalisation de documentaires à l'âge de 30 ans.
C'est l'occasion de donner une voix à ceux qui sont invisibles, de montrer des histoires extraordinaires.
Kamel Benkaaba est toulonnais. Il a fait ses études au Lycée Dumont
d’Urville, poursuit ses études à Aix-en-Provence où il rencontre sa
première femme, une suédoise qu’il suit dans son pays. Elle parle
français, il ne parle pas suédois mais s’y met très vite et s’installe
là-bas où il devient chargé de cours en cinéma à Copenhague. Un peu plus
tard il rencontrera… une autre danoise qui deviendra sa seconde épouse. Mais
notre toulonnais n’oublie pas ses racines varoises et y vient
ponctuellement « pour gagner vingt degrés et le soleil » me dit-il en
riant. C’est ainsi que, lors de ses séjours, on le retrouve à
l’association « Lumières du Sud » où à chaque fois, invité par sa
présidente Pascale Parodi, il vient parler cinéma bien sûr et vient nous
disséquer un film ou nous parler d’un réalisateur, comme Kubrick,
Fellini et, lundi soir, de Claude Sautet. Pourquoi Sautet ?
« Parce que – me dit-il – c’est un grand cinéaste qui fut
sous-estimé par la Nouvelle Vague, Godard, Truffaut et consort,
critiques de cinéma devenus réalisateurs dans le milieu des années 50
qui le remisaient, comme Tavernier ou Boisset et les plus anciens grands
réalisateurs de l’ancienne génération comme des réalisateurs du
« cinéma de papa » alors que chacun, (comme René Clément qui a fait
« Plein soleil » avec Delon et Ronet) a fait des chefs d’œuvres mais
alors, en 1954, il fallait tuer le père. Alors pourquoi les disqualifier
alors qu’ils ont fait de très grands films ? Claude Sautet a eu le
malheur de tourner « Classe tous risques » en 1960, la même année où
Godard sortait « A bout de souffle » et il fut aussitôt classé comme
réalisateur de polars. Pourtant Sautet est d’un grand modernisme car
il a apporté des idées originales comme, par exemple, les hommes qui
portent l’impuissance des choix de leur vie. Sautet ne fait partie
d’aucune école et il est le seul à savoir filmer l’impalpable des
sentiments. C’est pour cela que « César et Rosalie » fait partie aux USA
des films français marquants. « Si la vie passe dans un film, c’est que
le film est bon » aimait-il à dire. Il a su également imposer le
film choral, des portraits de groupes où l’amitié, la famille, l’amour,
la vie, la mort se mélangent autour de nombreux comédiens comme dans
« Vincent, François, Paul et les autres ». Il a su également filmer la
femme des années 70, une femme forte, libre, qui s’assume, qui avorte
parce qu’elle n’aime plus l’homme avec qui elle est, qui mène deux
amours en même temps, ce qui était alors très nouveau. Et à ses côtés,
l’homme qui n’est plus le héros, qui a des difficultés à être l’homme,
qui a des failles ».
On écouterait des heures parler Kamel de cette passion qu’il a du
cinéma, qu’il connaît sur le bout des doigts, véritable encyclopédie de
tous les cinémas et il nous fait partager cette passion. Ce soir-là,
Sautet a été rendu à sa lumière et à travers des écrits, des séquences
de deux films « Les choses de la vie » et « Un cœur en hiver », il nous
révèle un réalisateur imaginatif, sensible. Cet accident des « Choses
de la vie » est quelque chose d’unique, qui démarre dès le début du
film, pour y revenir tout au long, avec les derniers souvenirs d’un
homme qui ne sait pas alors qu’il va mourir mais qui se remémore sa vie.
La scène de l’accident est unique, superbement filmée et rythme le film
avec cette musique de Philippe Sarde mêlée à celle de Vivaldi et avec
cette sublime chanson que Romy Schneider et Michel Piccoli interprètent
« La chanson d’Hélène ». « La musique – dit-il – prend une grande
place dans les films de Sautet, on le voit dans « La choses de la vie »
qui accompagnent tout le film dont l’accident filmé au ralenti puis en
accéléré qui revient au fur et à mesure. Pour « Un cœur en hiver » La
musique de Ravel est d’autant plus omniprésente qu’il s’agit d’une
histoire complexe entre une violoniste (Emmanuelle Béart) et deux
luthiers (André Dussolier et Daniel Auteuil) et il a choisi des musiques
de Ravel, quelquefois dissonantes, mais qui épousent parfaitement les
sentiments de ce trio amoureux ambigu et compliqué. Trois personnages,
trois instruments : le violon, le violoncelle, le piano. Et aussi la
musique de Philippe Sarde qui se mêle à la complexité des sentiments des
trois comédiens. Et toujours cette façon de filmer l’ineffable ».
Que dire de cette soirée qui nous a fait retrouver et mieux
comprendre l’un de nos plus grands réalisateurs français, malgré
seulement 13 films à son actif, alors que Chabrol, par exemple, en a
réalisé 57, souligne Kamel qui nous a redonné l’envie de redécouvrir ce
magistral réalisateur.