Six-Fours – Six N’Etoiles
Laure PRADAL : la passion Doc
Après avoir quitté son Ardèche natale à 18 ans, Laure Pradal a fait
des études scientifiques et d’enseignement math-physique, à Lyon, Nîmes,
Montpellier. Suite à un déclic, une rencontre à la fac de lettres avec
un réalisateur, elle décide de s’orienter vers le cinéma. Non pas de
fiction mais de documentaire. Et la voilà qui va très vite réaliser des
courts-métrages pour l’émission de « Strip Tease », émission venue de
Belgique mais qui s’installe sur Canal Plus.
Ce sera le coup de foudre et de ce jour,elle n’arrêtera pas de réaliser des documentaires pour France 2, France 3 et Arte.
Grâce
à sa rencontre au festival Méditerranéen de Montpellier avec Pascale
Parodi, présidente de l’association six-fournaise « Lumières du Sud » et
de Noémie Dumas, directrice du Six N’Etoiles, la voici venu nous
présenter son dernier doc : « Des livres et des baguettes ». Un
documentaire où un jeune animateur, Nourdine Bara, a eu la superbe idée
de réunir, dans une boulangerie d’un quartier populaire de Montpellier,
la Paillade, des rencontres autour du livre « Dites-le avec un livre ».
Un lieu de rencontres mensuel où se retrouvent, adultes et enfants venus
de tous horizons, de toutes ethnies, qui se réunissent pour parler de
leurs livres préférés ou leurs propres écrits, d’en lire des passages,
de faire de la musique, de chanter, de parler d’eux dans une joyeuse
convivialité, avec des témoignages émouvants ou drôles, en toute liberté
d’expression. Un lieu chargé d’universalité, de bonnes ondes et de
fraternité.
Et on ne pouvait s’empêcher de se dire que si la même chose se produisait partout ailleurs, le monde serait meilleur.
Laure Pradal a toujours choisi des sujets qui parlent à tout le monde, qui parlent d’humanité.
« Mes
sujets sont variés puisque, pour « Strip-Tease » je réalisais des films
sur l’enfance, puis je suis passée à d’autres sujets comme le portrait
d’une enfant handicapée que j’ai suivie durant quinze ans ou celui de
Jean Carrère, je choisis un thème et je tourne autour de lui avec comme
principe, comme pour « Strip-Tease », de ne faire aucune interview ou
d’ajouter une voix off. Je laisse parler les gens et me contente de les
filmer comme pour ce documentaire « Des livres et des baguettes » où
chacun s’est exprimé en toute liberté, seulement canalisé par Nourdine.
Après, chacun s’exprime comme cette petite fille qui nous lit un extrait
de son livre préféré, cet homme qui nous fait un rap qu’il a écrit,
cette jeune femme qui chante l’opéra magnifiquement, ces musiciens qui
font danser les gens, cette femme qui nous raconte comment elle est
venue à la lecture alors que ses parents sont illettrés…
Comment choisissez-vous vos sujets ?
Très
souvent par hasard, au gré d’une rencontre, d’un fait divers, comme le
film que je prépare pour juin sur un immeuble vertical où vivaient des
marocains et qui va être détruit.
Je suis aussi en train de préparer
un film sur la chanteuse d’opéra que vous voyez dans le film. Elle se
nomme Narimène, elle a un talent fou et n’a pas été prise à un concours
alors qu’elle était l’une des meilleures, tout simplement parce qu’elle
n’a pas voulu enlever son turban qui fait partie intégrante de sa
personnalité ! En ce moment elle est à Londres où sa vie va peut-être
changer. J’ai un collaborateur qui est allé la filmer.
Ce ne sont donc pas des films de commande ?
Non,
je choisis mon sujet, je me renseigne, je fais des repérages et puis le
monte mes films et je tourne avec une équipe réduite de deux ou trois.
J’écris d’abord un scénario que je propose à divers producteurs et
quelquefois je tourne sans savoir si le scénario ou le film sera
accepté.
Ce peut être frustrant ?
Oui, lorsque le
sujet est refusé. Ça ne m’est pas arrivé souvent mais alors je le mets
de côté en me disant que j’y reviendrai plus tard. J’ai toujours deux ou
trois sujets dans ma tête et souvent, entre l’écriture, l’acceptation
et le tournage ça prend du temps. J’arrive à réaliser un film dans
l’année. Quelquefois deux, mais c ‘est rare. C’est un travail de longue
haleine… et de patience ! L’intérêt est que je travaille en toute
liberté, que j’ai tout mon temps, que je n’ai pas de dead line.
Avez-vous réalisé des films de fiction ?
Non,
et ça ne me préoccupe pas, d’abord parce qu’un film de fiction dépend
de trop de choses : l’argent, les comédiens, les producteurs, le sujet
qui, une fois écrit, doit être suivi. Je ne l’ai fait qu’une fois avec
un film sur un prisonnier. Difficile de tourner en prison, d’y faire
entrer des enfants, dnc je l’ai tourné comme une fiction… sans les
contraintes d’une fiction !
Et ce que j’aime c’est le côté inattendu
car certaines fois, au cours du tournage, il se passe quelque chose
qu’on n’attendait pas.
Êtes-vous journaliste ? Avez-vous eu envie d’écrire autour de vos sujets ?
Non,
je suis simplement réalisatrice et j’écris la colonne vertébrale de mon
sujet. Je n’interview personne et mes reportages sont des moments de
vie. Vous savez, il suffit de regarder autour de soi pour trouver un
sujet. Après ça, peut-être qu’un jour viendra où je pourrai écrire les
expériences que j’ai vécu autour de ces tournages.
Avez-vous eu des refus de gens qui ne voulaient pas que vous les filmiez ?
Ça
m’est arrivé mais pas si souvent que ça. Pour certains c’est un non
définitif et je n’insiste pas. Pour d’autres, ils ont envie de
s’exprimer et je les laisse s’exprimer en toute liberté. D’ailleurs, on
est le plus discret possible et très vite ils oublient qu’ils sont
filmés. Ils sont même ravis de se voir sur écran après car le leur
montre toujours le film une fois monté.
Je suppose qu’étant donné le format de 50’, vous devez mettre des séquences de côté ?
Rencontrer le public est indispensable pour vous ?
Oui car si certains téléspectateurs m’écrivent, beaucoup se contentent de regarder et d’écouter. Les rencontrer et discuter avec eux est quelque chose d’indispensable. Sans compter que voir le film sur grand écran, ça donne une autre dimension au sujet ». Ce soir-là le public a beaucoup apprécié cette projection et cette rencontre qui a duré longtemps avec la réalisatrice qui parle de ses films avec une passion qu’elle nous a fait partager.
Jacques Brachet
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